nutrition-adolescent

 Accélération de la vitesse de croissance, déstructuration de l’alimentation, déviances alimentaires, culte de la minceur, pratique intensive d’une activité physique et sportive sont autant de facteurs qui font de l’adolescence une période à risques de carences nutritionnelles. Voici quelques informations pratiques concernant les besoins essentiels à cette période de la vie : calcium et vitamine D, fer et acides gras essentiels.

1 – Couvrir les besoins en calcium chez l’adolescent

De 10 à 19 ans, les apports conseillés en calcium sont de 1200 mg par jour. L’exclusion des produits laitiers ou leur substitution par des boissons végétales, très en vogue actuellement, ne permet pas d’atteindre ces recommandations (cf. tableau ci-dessous). Or, la constitution du pic de masse minérale osseuse, déterminant dans le risque ultérieur d’ostéoporose, dépend en grande partie des apports en calcium.

ProduitsTeneur en calcium en mg/100g
(Source : Ciqual 2017)
Boisson au soja12
Boisson au soja enrichie en calcium (1)98
Boisson à base de riz5
Boisson à l’amande7
Boisson à base d’avoine1
Lait entier UHT120
Lait ½ écrémé UHT (2)117

(1) A l’exception de celles enrichies en calcium, les boissons végétales sont quasi dépourvues de calcium.
(2) Le lait ½ écrémé contient autant de calcium que le lait entier.

2 verres et demi d’eau minérale Contrex apportent autant de calcium qu’un verre de lait alors qu’il faudrait boire plus de 2L d’Evian pour avoir une quantité équivalente de calcium.

(Un verre = 150 ml)

A quelques exceptions près (choux par exemple), la présence de phytates et d’oxalates présents dans les végétaux diminue son absorption. Les eaux minérales riches en calcium (Hépar, Courmayer et Contrex) constituent, quant à elles, une excellente source de calcium bien assimilé par l’organisme.

Astuces : Mon ado ne veut plus boire de lait le matin !

  • Inclure le lait dans des préparations salées ou sucrées (gratin, sauce béchamel, flans salés ou sucrés, crêpes, milk-shakes, lait frappé aux fruits, etc.)
  • Remplacer le lait par des yaourts à boire
  • Privilégier les fromages à forte teneur en calcium (parmesan, gruyère, emmenthal, comté, mimolette, etc.).

En cas d’intolérance au lactose avérée, le lait peut être remplacé par du lait sans lactose. La consommation de yaourt et de certains fromages peuvent parfois convenir. Un diététicien nutritionniste aidera l’adolescent à déterminer son seuil personnel de tolérance et assurera la bonne couverture des besoins en calcium à cette période de la vie.

Équivalences en calcium d’origine laitière

180 mg de calcium sont contenus dans :

un verre de lait de 150 mL
1 yaourt
150 g de fromage blanc
3 Petits suisses de 60 g à 4% de mat. gr. sur produit fini
20 g d’Emmenthal
40 g de Camembert
55 g de Ricotta

2 – Veiller au statut en vitamine D

La vitamine D ou calciférol, est une vitamine liposoluble (soluble dans les graisses).

La principale source de vitamine D provient de la synthèse cutanée à partir du rayonnement solaire (UVB). Les aliments contenant naturellement de la vitamine D ne sont pas nombreux : ce sont principalement les poissons gras (huile de foie de morue, saumon, sardines, maquereaux, harengs, etc.). En France, l’enrichissement en vitamine D du lait et produits laitiers ainsi que des huiles est autorisé.

Si la vitamine D est très étudiée pour ces effets extra-osseux (immunité, maladies métaboliques, etc.), son rôle dans le métabolisme phosphocalcique est bien établi. Elle joue un rôle dans la croissance et la minéralisation osseuse. La carence en vitamine D chez l’enfant est responsable du rachitisme.

La Société Française de Pédiatrie recommande la prise de 2 doses de 100 000 UI de vitamine D par an en hiver (novembre et février) entre 10 et 18 ans. Certains adolescents peuvent nécessiter jusqu’à une dose trimestrielle de 100 000 UI toute l’année (cf. populations à risque).

En pratique, seul le dosage plasmatique de la 25-hydroxyvitamine D permet d’apprécier le stock de vitamine D dans l’organisme. Les valeurs de référence pour la concentration en vitamine D et la définition d’une carence, d’une insuffisance et d’un niveau optimal à atteindre suscitent encore de nombreuses discussions au sein de la communauté scientifique. Un taux inférieur à 30 nmol/L expose à un risque élevé de rachitisme.

3 – Assurer la couverture des besoins en acides gras dits « essentiels »

Les lipides jouent un rôle capital dans le développement et le fonctionnement neuro-cognitif. L’Afssa (3) a remis à jour ses recommandations concernant les acides gras pour la population française en 2010. Les apports en graisses doivent représenter, chez l’adolescent comme chez l’adulte, 35 à 40% de l’apport énergétique total quotidien. Au-delà de l’apport quantitatif, la qualité des graisses ingérées est fondamentale.

Certains acides gras sont dit essentiels car 1) indispensables pour assurer la croissance et les fonctions physiologiques et 2) non synthétisés par l’organisme. Ce sont l’acide linoléique (oméga 6) et l’acide alpha-linolénique (oméga 3). Ces deux familles d’acides gras essentiels utilisent les mêmes enzymes pour la fabrication d’autres acides gras. Un excès d’oméga 6 mobilisera alors les enzymes pour la fabrication de dérivés de la famille des oméga 6 aux dépens des oméga 3. Le DHA (4) , un constituant majeur de la structure et du fonctionnement cérébral et visuel, est synthétisé par l’organisme à partir de l’acide alpha-linolénique et de l’EPA (5) (oméga 3) mais en quantité insuffisante : il est dit semi-essentiel. Un apport alimentaire est donc également indispensable pour couvrir les besoins.

Repères de consommation :

  • Consommer au moins deux portions de poisson par semaine dont une portion de poisson gras (saumon, sardine, hareng, maquereau)
  • Privilégier les huiles de noix, de colza et de soja, particulièrement bien équilibrées en acides gras essentiels.

Pour les adolescents non consommateurs de poisson, la cervelle constitue une autre source de DHA. Chez ceux ne consommant aucune source de DHA, il est important d’optimiser les apports en acide alpha-linolénique (précurseur des omégas 3) en privilégiant les huiles de noix, de soja et de colza particulièrement riches en cet acide gras pour augmenter la conversion en EPA et DHA.

(3) Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments devenue l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire, alimentation, environnement, travail).
(4) DHA : Acide Docosahexaénoïque
(5) EPA : Acide Eicosapentaénoïque

4 – Eviter la carence martiale (carence en fer)

Principalement, le fer intervient dans la synthèse d’hémoglobine et de myoglobine (protéine contenant du fer et présente dans les muscles), le fonctionnement et le développement cérébral ainsi que dans le système immunitaire.

La carence en fer est fréquente en pédiatrie. Les adolescentes sont plus à risque de déficit, particulièrement lorsqu’elles pratiquent la restriction calorique, le végétarisme ou le végétalisme.

En dehors du risque d’anémie, la carence en fer peut augmenter la susceptibilité aux infections, perturber le développement cognitif, entraîner des troubles neuro-psychiatriques et des troubles du comportement (hyperactivité).

On distingue deux stades dans la carence martiale :

  • Premier stade : diminution du taux de ferritine dans le sang (ou ferritinémie), réserve de fer dans l’organisme ; le taux d’hémoglobine reste dans les valeurs normales.
  • Deuxième stade : La ferritinémie est basse et l’hémoglobine est inférieure à la normale, c’est l’anémie.

Quelles sont les sources alimentaires de fer ?

Il existe :

  • Le fer héminique dans les viandes, les abats, la volaille, le poisson et les produits de la mer. Le boudin noir, le foie, le bœuf et l’agneau en sont les plus riches. Le fer héminique est directement absorbé pour 20 à 30%.
  • Le fer non héminique dans les végétaux (fruits et légumes et légumineuses), les œufs et les produits laitiers. Son absorption est moindre (2 à 5%) et dépend d’autres facteurs. La présence de tanins, de phytates et d’oxalates présents dans les végétaux vont réduire son absorption alors que la présence d’un aliment riche en vitamine C l’améliore (cf. encadré).

Il ne suffit donc pas de sélectionner les aliments ayant la plus forte teneur en fer. Il faut tenir compte de l’efficacité de son absorption.

Pour couvrir leurs besoins en fer, les adolescents devraient consommer deux portions de produits carnés (viande ou poisson, volaille) par jour.

Attention

L’excès de fer est délétère pour l’organisme : effet pro-oxydant (formation de radicaux libres) avec une mauvaise tolérance digestive, voire un effet pro-infectieux (constituant une source de fer pour les bactéries). Ne jamais s’auto-prescrire du fer sans avoir préalablement dosé son statut martial ! En cas de déplétion martiale (ferritine basse et hémoglobine normale), la première intention est d’évaluer, par un bilan nutritionnel, les apports alimentaires en fer (en tenant compte de l’éventuelle consommation d’aliments enrichis en fer, tels que les céréales de petit déjeuner enrichies en vitamines et minéraux par exemple) et s’il y a lieu d’enrichir l’alimentation par des aliments naturellement riches en fer. Si cette mesure s’avère inefficace pour remonter la ferritinémie, votre médecin pourra vous prescrire un traitement adapté.

Conclusion

L’alimentation équilibrée et diversifiée, adaptée à l’âge et couvrant les dépenses énergétiques permet d’assurer la couverture des besoins nutritionnels spécifiques de l’adolescent. Toutefois, l’adolescence est une période à risque de carences nutritionnelles de par la déstructuration des prises alimentaires, la restriction calorique et les régimes d’exclusion (régime sans lactose parfois injustifié, végétarisme et végétalisme, etc.).

L’usage de compléments alimentaires est bien souvent abusif et injustifié. Il faut rappeler que la très grande majorité de ces compléments n’ont pas fait la preuve de leur efficacité ni de leur innocuité. Certains effets indésirables survenus à la suite de la prise de compléments alimentaires ont été répertoriés dans le dispositif national de nutrivigilance. Les aliments courants doivent toujours être privilégiés en première intention. Toutefois, dans certaines situations particulières (certaines malabsorptions liées à des pathologies comme la mucoviscidose par exemple, la chirurgie bariatrique, les régimes d’exclusion), la complémentation peut s’avérer nécessaire voire indispensable mais doit être bien encadrée par le pédiatre ou le médecin de famille après avoir pratiqué un bilan nutritionnel (étude qualitative et quantitative détaillée des habitudes de consommation) par le diététicien nutritionniste.

Cas de l’ado végétalien

En l’absence totale de produits animaux, les carences sont réelles. Il est indispensable de surveiller le statut martial et de compléter les apports en calcium, en vitamines D et B12. L’Anses souligne que la spiruline ne peut constituer une source fiable de vitamine B12 pour les populations excluant les produits d’origine animale (celle-ci étant majoritairement sous forme d’analogue inactif). Seule la complémentation en DHA pose problème puisque ce sont des huiles de poisson. Il faut alors d’autant plus optimiser les apports en acide alpha-linolénique pour accroître la synthèse endogène de DHA.

Fiche infos

Séverine OLIVIE

Diététicienne nutritionniste
Ingénieur de maîtrise en Ingénierie de la Santé
Diplôme de Recherche Technologique en Génie Alimentaire et Biologique
D.U. Nutrition de l’enfant et de l’adolescent
D.U. Nutrition du Sportif
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